La Gardienne des Ténèbres Ça fait, ça fait deux ans que le Hellfest tease sur la gardienne des ténèbres. Cela serait intéressant que vous présentiez la machine et votre parcours, parce que vous n'avez pas du tout un cursus métal. Sachant que notre publication paraitra après le fest, et on essaiera de grimper dessus pour faire un petit tour.
Vous ne pourrez pas faire de "tour de Gardienne" car elle sera présentée mais elle n'évoluera dans le site. Ben n'a pas voulu spécialement qu'elle se déplace. Ils ont un petit peu peur. Moi, je pense que ça aurait été possible, mais elle va rester fixe, se réveiller, tourner sur elle-même et se rendormir entre 22 heures et minuit et demi. Cela sera uniquement quelques mises en mouvements, quelques effets, etc., pour montrer le mouvement qu'elle est capable de faire.

Revenons au tout départ de cette "machine"...
La compagnie de la machine, a été créée en 1999 et la volonté de constructeurs de machinerie, de théâtre de rue de mettre en commun leurs outils pour construire et faire leur rêve, réaliser leurs rêves et être aussi plus performants et, de fil en aiguille, on a d'abord été prestataire au service de... et puis on a fini par monter nos spectacles et nos projets, nos expositions. Et aujourd'hui, c'est 3 lieux : l'atelier de Nantes, sur l'île de Nantes, en plein cœur de la ville, qui est un atelier construction avec l'ingénierie qui, est liée à la construction. Puis on a aussi Tournefeuille, dans un lieu qui héberge plusieurs compagnies : un centre des arts de la rue, un atelier de construction, et on a la halle de la machine à Montaudran, qui était un lieu où les machines, quand elles ne sont pas en en spectacle, sont comme à l'écurie, exposées. En tout, ça fait une soixantaine voire plus de salariés permanents et deux cents intermittents du spectacle qui gravitent autour de nos projets. Il y a deux associations : la machine Nantes et la machine Toulouse. Sachant que la machine Toulouse gère plutôt le patrimoine de la compagnie et s'adresse à un public au quotidien, assez touristique, culturel et urbain à Nantes, on est vraiment une compagnie de théâtre de rue et constructeurs.

Et pour ton parcours personnel ?
Moi, personnellement, je suis directeur artistique de la compagnie la machine. Je dessine les machines, je les suis en construction, ensuite je les mets en scène en spectacle. J'ai fait des études agricoles, un BAC technique agricole, et puis ensuite la culture m'a rattrapée, je me suis inscrit à la fois aux beaux-arts et dans une filière agricole, et puis ce sont les beaux-arts qui m'ont choisi. Donc, j'ai continué dans cette veine. J'étais plutôt destiné à être plasticien, je faisais beaucoup de vidéos, de performance. C'était à l'époque où on ne dessinait plus. Finalement, en travaillant, de commande en commande, la vie m'a rattrapé, le dessin est revenu et aujourd'hui je dessine beaucoup les objets en mouvements. La compagnie a été créée en 99. Elle existait une autre forme, avant, associative toujours, et aujourd'hui, on fait des spectacles de rue, on accompagne des projets urbains, on accompagne l'architecture et parfois on accompagne même d'autres artistes, qui travaillent notamment pour le voyage à Nantes (NDLR : qui dépend de l'office du tourisme de Nantes). Nous accompagnons même un sculpteur qui fait des machines pour les malvoyants via des sculptures, et on va l'aider à fabriquer ces éléments, parce qu'on a un savoir-faire d'ingénieurs, en connaissant bien les normes en plus. En plus, dans l'espace public, on peut aider des artistes qu'on pas d'atelier c'est une espèce de mélange comme ça qui fait qu'on arrive à faire tourner un atelier à Nantes, qui est au cœur de la ville, sur l'île de Nantes, et par exemple, aujourd'hui, on met au point la gardienne, on ouvre la porte de la grande porte de l'Atelier on sort dehors. Les gens tombent nez à nez avec une nouvelle machine, sans être prévenus dans la vie. C'est assez particulier de réinventer l'espace public et la vie.

C'est ce que j'ai vu, puisqu'il y a quatre jours, il y avait une photo de la gardienne, alors qu'on nous a dit: "couvre-feu jusqu'au 26 ou 27 juin". Mais finalement, elle s'est montrée en public un petit peu avant.
Ça reste un couvre-feu, mais il y a quelques badauds qui passent. Aujourd'hui, avec les réseaux sociaux... on arrive quand même à garder la surprise ; on met en place des rabatteurs et on demande aux gens de ne pas la prendre en photo. Mais là, en l'occurrence, le dispositif n'a pas nécessairement eu besoin d'être mis en place.

Votre cœur de métier et votre parcours, c'est l'Art de la rue, c'est le spectacle. Vous avez commencé si je me souviens bien, avec le Royal de Luxe aussi...
J'ai rejoint Royal de Luxe sur une partie de l'activité mais toujours en ayant mon atelier et mon activité personnelle, etc., je n'ai jamais fait partie intégrante de la compagnie . J'ai construit certaines machines, je ne partais pas en tournée et je dirigeais lors des spectacles, notamment les grands spectacles, parce que j'aime c'est vraiment l'espace public, la rue, la vie ou le paysage en général. Et moi, ce qui m'intéresse dans ce travail, ma recherche, c'est le mouvement, c'est-à-dire comment le mouvement arrive à générer de l'émotion en créant d'avis parce que pour moi, le mouvement, c'est l'expression de la vie quelque chose qui arrête de bouger, il y a de fortes chances pour qu'il soit mort de sa propre mort ou alors inintéressant à voir, puisque qu'il ne bouge pas. Bon, c'est toujours intéressant la contemplation, on pourrait être en mouvement autour d'un objet fixe. Mais là, moi, ce qui m'intéresse c'est comment le mouvement, par ces cycles, la fréquence, l'amplitude ... se met à raconter une histoire, dialogue avec l'humain et créé de l'émotion. Ainsi, un mouvement très rapide à très haute fréquence, c'est un peu stressant. Alors qu'un mouvement lent et doux aura un tout autre rendu, c'est aussi simple que ça. Un clignement de paupière, un mouvement de bras, un mouvement de poignets, tout cela devient vraiment tout un langage très particulier. En plus, comme la gardienne a un visage humain, c'est de l'anthropomorphisme, on n'a pas le droit à l'erreur ; avant de tourner la tête à gauche, les yeux doivent partir d'abord. il faut être complètement dans ce langage de manipulation pour créer une expression qui soit puissante et reconnue.

La Gardienne des Ténèbres Comment s'est fait la rencontre avec Ben et le Hellfest ? Parce que, même si vous êtes des acteurs régionaux et connus et reconnus, chacun pour leur activité, comment s'est fait la rencontre ? Comment a-t-elle été provoquée et surtout, en tant que non fan de métal, comment vous avez reçu cette demande ?
Je ne suis pas un super fan de Metal mais j'aime quand même bien métal. J'écoute pas mal de musique issue de cet univers. Mais effectivement dès que cela part un peu trop dans le Metal extrême je lâche l'affaire. Mais sinon, j'aime bien le rock et j'aime bien le métal. Je connaissais l'existence du Hellfest par la presse mais cela me faisait un peu peur. Mais ma femme est y allée, elle est revenue complètement enchantée en n'en rapportant que du bien : que les gens sont sympas, qu'il y a une super ambiance et que les décors sont dingues. Et l'année suivante, Johanna Rolland, la maire de Nantes, à l'époque a organisé une rencontre parce qu'elle voulait rapprocher le Hellfest de Nantes. Comme la plupart des festivaliers débarque à l'aéroport ou à la gare de Nantes, elle voulait faire en sorte que le festival qui devient espèce d'anthologie et qui prend beaucoup d'importance dans la région puisse faire rayonner Nantes. Elle a réuni tous les acteurs culturels pour un dîner, et autour de la table. Il y avait Ben du Hellfest, la folle journée, le voyage à Nantes et la Machine. Tout le monde s'est rencontré et avec Ben cela a un peu flashé, il m'a parlé de l'araignée que nous avions déjà réalisée. Ensuite on s'est quitté, et, deux ans plus tard, nous nous sommes revus et nous nous sommes dit que nous ferions bien quelque chose ensemble. Et c'est comme ça que j'étais invité au Hellfest. J'ai pris une claque énorme, parce que c'est vraiment génial comme festival. C'est une expérience vraiment incroyable, surtout quand on est un peu traité en VIP, nous avons une vue d'ensemble sur la foule, ça crée vraiment des images qui sont hallucinantes, et je me suis mis à réfléchir à ce projet, sachant évidemment qu'il allait ouvrir une brasserie, restaurant et créer un espace qui, à l'époque n'était un espace public, mais un espace autour de cette brasserie, ouvert à l'année et j'ai vite remarqué que le parc était, lorsqu'il était "éteint", sans ces milliers de visiteurs était intéressant. Et j'ai trouvé le parc très beau, comme ça, endormi, un peu comme si on traversait un décor de cinéma ou un studio au cinéma comme Cinecitta ou Universal studios. S'il n'y a pas de tournage de film, on est vraiment dans une ville fantôme, avec un décor endormi, et je trouvais cette ambiance assez marrante en lien avec la nature. Et j'ai proposé créer un personnage qui vivrait là et on s'est mis d'accord sur l'idée que cela devrait être un espace public. Et c'est comme ça que le parvis autour de la brasserie est vraiment devenu un espace public ouvert jour et nuit et que j'ai dessiné une gardienne des ténèbres, c'est à dire une cerbère, un personnage qui garde les portes de l'Enfer et qui va autoriser les festivaliers ou les visiteurs à aller en enfer, sachant que tous les festivaliers ont envie d'aller en enfer là-bas... Le Paradis, cela ne les intéresse absolument pas. C'est chiant, en fait d'être au Paradis !

C'est ça, et nous attendons même d'y retourner pendant plus 350 jours. On attend ça d'une année sur l'autre ! On est d'accord elle sera située vers l'ancien Louxor vers la pyramide.
J'ai dessiné la gardienne mais aussi un abri, une porte des ténèbres, une porte de dix mètres de haut, en mouvement, avec des crânes de crabe, mi crabe- mi-araignée et des pattes d'araignées ou de crabe et qui laisse sortir et entrer. On n'a pas trouvé le financement pour faire cette partie là, on cherchait un financement public pour l'espace public. Les collectivités tardent, peinent à s'engager, tournent autour du pot, donc on n'a pas pu le faire dans le temps imparti. On a conçu la gardienne, mais Ben n'abandonne pas l'idée de faire cette porte de ténèbres.

Oui, parce qu'on a surtout teasé autour du dessin de la gardienne depuis juin 2022. C'est ça, ça fait deux ans. D'ailleurs félicitations ! Puisque j'ai visité la Philharmonie, l'exposition Diabolus in Musica, et j'ai vu qu'il y avait le fameux dessin qui nous a fait baver, entre tous les festivaliers depuis deux ans, disant à quoi ça va ressembler, et on est aux portes de voir ça. Ca doit vous faire quelque chose d'avoir d'avoir contribué à cette exposition, qui est la première en France. Même si vous n'êtes pas un grand fan de Métal, le fait d'avoir une de vos œuvres, ne serait ce qu'un dessin, à la Philharmonie, doit faire quelque chose.
Oui, c'est chouette, je ne m'y attendais pas, je ne savais pas que la Philharmonie faisait ce genre d'expo, il y a des belles expos, la dernière aussi, était assez belle. C'est très sympa que le dessin soit là-bas, le dessin original.

Vu qu'on est sur le dessin et la partie création, comment comment vous avez imaginé tout ça ? Parce que vous aviez déjà un minotaure ? Je crois qu'il était un petit peu un animal mythique, mythologique. Comment imaginez par rapport au festival ?
J'ai dû dessiner là parce que, pendant longtemps, j'ai dessiné des animaux inspiré de la nature et vraiment très proches de la nature, en travaillant sur l'anatomie des animaux en les déclinant en machines, à un moment, les chimères et le fantastique est rentré dans l'aventure. Je me suis à mixer ces animaux, j'en ai fait pas mal puisque là on sort un bouquin chez Acte Sud, qui s'appelle Chimère et autres animaux fantastiques, et il y a 218 pages. On a 90 dessins de chimères et d'animaux même si parfois il y en a plusieurs sur un seul objet. Et là, ce qui était assez intéressant, c'est que dès que je me suis intéressé au monde des ténèbres, à l'univers de la mort et à tout ce qui s'y rattache, très vite, on est arrivé sur des cerbères à trois têtes et on est rentré dans un langage un peu mythologique, avec tous les signes qui accompagnent toutes les histoires qui sont racontées autour de cet univers de la mort. Et j'ai trouvé ça hyper intéressant et me suis nourri de toute cette esthétique souvent portée par les festivaliers et par l'équipe du Hellfest, pour créer une créature qui s'en inspire. Ben m'avait parlé du corbeau, qui est un peu un symbole pour le Hellfest. Je tentais un peu le corbeau, je suis aller chercher le bouc avec les cornes qui représentent souvent la mort, etc, etc, et à partir de ça, je me suis fait mon personnage. On me demande mon cerbère à moi, et donc ça donne une femme à la peau mate, une métisse, avec des cornes de bouc, assez belle, scarifiée de signes ésotériques et de scarifications et dont le buste humain se transforme en corps de scorpion, avec une queue de scorpion et des pattes qui sont entre le crabe et l'araignée. Elle est très belle, mais ces dents sont un peu abîmées et elle émet des son stridents assez horribles.

Ok tout, tout un programme ! J'envie Nolive, qui verra ça dans quelques minutes...
Attention, parce qu'on vient de lui mettre son masque ! On la sortait sans son masque, elle avait les yeux en orbite, c'est un peu comme si on décharnait son visage...

La Gardienne des Ténèbres La Gardienne des Ténèbres C'est ce qu'on voyait lors de sa sortie il y a quatre jours, où, effectivement il manquait des éléments... Cette création raconte une histoire, c'est quelque chose qui est indispensable pour vous...
Oui, toutes nos machines naissent dans l'espace public, pour y rester ou pas, mais avec un spectacle, avec une histoire racontée ! Le Dragon de Calais a été libéré par les pelleteuses, une Pierre sacrée a été déplacée, elle est passée du monde du dessus à la surface, parce que dessous, on imagine qu'il y a des titans et des galeries dans lesquelles on trouve tout un univers, habités par par des chimères, des géants... Et à chaque fois il y a une histoire, la gardienne, évidemment, c'est une cerbère. Elle est envoyée par Ades et puis elle vient agrandir son peuple avec des âmes damnées damnées, passionnées de la mort et de cet univers. Elle n'a pas été dessinée pour être Lilith mais finalement, on trouve que ça lui va bien. Lilith qui, aujourd'hui, est un peu le symbole du féminisme et de l'affranchissement de la femme, sa liberté.

C'est intéressant, parce qu'on est souvent critiqué dans le milieu métal en disant que c'est un milieu très masculin. C'est bien qu'il y ait une figure féminine qui arrive. Vous parliez des yeux, j'ai l'impression que les yeux sont bleu clair, c'est ça, quasiment transparent...
Ils sont gris. C'est un peu des yeux d'Outre-Tombe.

Elle peut se déplacer, mais elle sera statique sur le Hellfest...
C'est ça. Elle aura des mouvements mais ne bougera pas sur le site.

Je pensais qu'on pourrait éventuellement monter dessus, un petit peu comme comme l'éléphant à Nantes.
On pourra le faire plus tard. Il y a deux modes. La plupart des machines arrivent dans des spectacles et en mode "machine de spectacle", elles sont manipulées par 7 ou 18 personnes et ensuite elle passe en mode "machine de ville" avec la capacité de transporter des personnes sur leur dos. Et cette fonction citoyenne, un peu d'utilité publique, on va dire, de transport d'être humain, et on peut voyager sur leur dos, ça limite un peu leurs mouvements. Et on passe en mode plus automatique, avec simplement trois ou quatre manipulateurs pour qu'économiquement ça soit faisable, viable, parce que 17 manipulateurs tous les jours de l'année plusieurs fois par jour, c'est énorme, c'est économiquement impossible si n'est pas subventionné.

On n'a pas parlé des dimensions de cette gardienne...
Elle mesure entre huit et dix, onze mètres de hauteur en fonction de sa position, parce qu'elle bouge dans tous les sens, et elle fait une quinzaine de mètres de long. Pour nous, c'est une machine plutôt moyenne, moyenne-grande, c'est pas une grande machine. Les autres font doiuze-treize mètres, mais bon, mais celle là, elle est intéressante, parce qu'elle pourra se glisser dans les rues étroites des villes, ça c'est c'est sympa.

Au niveau du délai entre la conception et les premiers croquis, jusqu'à jusqu'au mois de juin, ou finalement elle va être vivante...
Pour construire une telle machine, il faut 2 ans, 2 ans et demi, ça a pris plus de temps, parce qu'il y a eu le covid. Et puis Ben a préféré que ça arrive en même temps que la brasserie, les chantiers ont pris du délai, les permis de construire, c'est un peu compliqué à chaque fois, on avait un peu de temps pour la construire. N'empêche pas que là, c'est vraiment la période finale : elle est en train d'apprendre aux calculateurs, aux automates, aux capteurs à gérer les mouvements et aux manipulateurs à la manipuler, tout en continuant à travailler sur l'assemblage même si le plus gros est fait. Hier, toute l'équipe du Hellfest était là pour voir ses premiers mouvements.

Combien de personnes ont travaillé sur le projet et quel corps de métier ?
Durant deux ans, on va dire que c'est à-peu-près une cinquantaine de personnes en permanence en deux ans, qui travaillent sur un projet comme ça. On a des sculpteurs sur bois, des menuisiers ébéniste, des chaudronniers, des soudeurs de toute qualification, automaticiens, électriciens, coloristes. Il y a à peu près 40 corps de métier. On a des spécialistes des effets spéciaux, de la plomberie, du gaz, de la tuyauterie, de l'hydraulique des pneumatiques, des vérins électriques... On a toute la partie motorisation, avec un moteur qui peut passer du diesel à l'électrique. Il y a des ingénieurs, des calculateurs qui calculent les efforts, on a des ingénieurs aussi qui dimensionnent et qui font les plans. Et puis après, il y a tout les aspects juridique, financier, administratif... On avait compté tous les métiers, ça faisait à peu près 60 métiers qui sont parfois incarnés par la même personne. Quand on conçoit la machine, on commence déjà la construction. Ce qu'on appelle en conception réalisation, c'est une sculpture et à la fois un objet industriel, parce que c'est extrêmement sollicité. A terme, ça fait des milliers de kilomètres.... Sur cette sculpture, on se donne la possibilité de changer des choses, d'intervenir et de dialoguer avec la matière et de revenir en arrière. Ça reste une matière vivante et sensible.

Vous aviez fait des miniatures, à des échelles plus réduites, au départ pour concevoir et ensuite voir comment adapter sur la mécanique.
Il y a une phase de dessins puis un sculpteur va l'interpréter en 3 dimensions avec toutes les indications, et on va faire demi formes qu'on va scanner et recoller pour avoir le volume. Et là, on a une peau numérique, on lui donne une épaisseur, on travaille sur du bois. On sait comment fixer la peau sur un squelette intérieur qui est en acier, et tout ça, ça part en même temps. On fait des calculs pour le châssis, essayer de ne pas dépasser une masse trop importante parce que si vous avez des machines qui arrivent à 25-30 tonnes, il faudrait leur faire des chaussées spécifiques... La route est prévue pour 11 tonnes à l'essieu... on peut aller plus loin, évidemment, mais occasionnellement. Il y a un tas de données... il ne faut pas que la machine puisse basculer au vent, glisser alors qu'il y a de la foule autour, il y a les normes, il y a les contrôles des soudures, il y a les chiffrages aussi...
Nos constructeurs font à la fois la conception, passent à l'atelier et manipulent.

Alors avant cette rencontre avec Ben, vous auriez imaginé travailler pour un projet sur ce site qui est quand même assez exceptionnel, parce que moi, du point de vue personnel, en tant qu'amateur et connaissant le travail des machines de Nantes, ça me paraissait une évidence.
C'est ce que dit Ben, c'est qu'on était emmené par nos univers. On est aussi associatif, on a un peu les mêmes exigences esthétiquement... Il y a beaucoup de connexions en développant des univers pareils, mais ce qu'on fait a aussi un petit côté rock, provocateur. Puis, c'est un espace public. Naturellement, c'était intéressant qu'on se rencontre. Mais moi, j'imagine rien avant, puisque je ne fais pas de carrière, ma vie a toujours été faite de rencontres. Demain, je ne sais pas. On cherche pas à grossir ou à faire des séries...

La Gardienne des Ténèbres Pour nous, c'est un mariage évident, parce qu'il y a aussi l'univers de Monic la Mouche sur le site, tout ça se marie extrêmement bien.
C'est vrai qu'on retrouve dans le spectacle le métal, le feu. Tout cet univers chimérique et mécanique. C'est à la fois naturel et sympathique.

Vous vous attendiez une question particulière que j'allais vous poser et quelle serait la réponse à cette question que j'ai pas posée.
Non, en octobre, il y aura eu une exposition. On verra les dessins de la gardienne reproduits à la Médiathèque José Cabanis à Toulouse. On va faire un spectacle à Toulouse... le dessin est exposé à la Philarmonique. L'univers de la gardienne continue à vivre. Après le Hellfest, ce sera chouette de pouvoir suivre son parcours, parce qu'elle va se promener de ville en ville, pour aller récupérer et agrandir son peuple, emmener un peu de monde sous terre.

Ça marche. Je connais un ou deux-points de chute où elle sera bien, où elle serait bien accueillie. Il y a un petit festival à Saint-Flour fin août qui est en train de monter, et même à Paris, si vous voulez pour les JO, n'hésitez pas, ça fera un bon moyen de transport !
J'ai tenté le coup ! Anne Hidalgo a décrété que c'était trop nantais ! Mais on a tenté le coup. On a fait un super scénario autour de la gardienne pour récupérer les anneaux qui étaient éparpillés dans la ville et que le moteur rassemblait, il y avait un combat avec le titan, parce que les deux sont fâchés, puisque les Romains, je sais pas quel empereur romain a interdit les jeux à une époque, et les anneaux étaient dispersées, même si, à l'époque, ils n'existaient pas. C'était un petit scénario que j'avais fait. Ca aurait super bien fonctionné...

Oui, ça a l'air vendeur, pourtant
C'était super.

Ça manquait de rats et de billets de RER à 7€. C'est pour ça.
Peut-être... Ca finissait aux Invalides avec 8 grue... Mais on n'arrivera pas aller à Paris.

C'est bien dommage, mais en tout cas, merci beaucoup pour votre temps. Je vous laisse avec, avec Nolive qui va faire de belles photos...
Un dernier petit mot, il ne faut pas confondre "La compagnie de la Machine" et "Les machines de l'île". "La compagnie de la Machine" est une compagnie de théâtre, elle est indépendante, privée, non subventionnée, et "Les Machines de l'île" dépendent de la métropole et du Voyage à Nantes, c'est une institution, un service public qui fonctionne sous forme de Société Publique Locale. On est deux auteurs, avec Pierre, on construit dans notre atelier, ils acquièrent les machines et les mettent en délégation de service pour un projet touristique, culturel, nantais. Nous, on travaille pour la Machine, pour le monde entier, sur nos projets, et notamment à Calais et ailleurs. Mais c'est c'est pas le même projet, pas le même univers. La seule connexion, ce sont les auteurs de tout ça, et que ces machines sont construites dans notre atelier.

Merci pour cette précision. Je pense que je dois pas être le seul à faire la confusion

J'ai fait l'erreur d'appeler le projet "Les machines de l'île" et d'appeler la compagnie "La machine". Ca n'aide pas du tout ! Je le dis parce que Europe 1 a fait l'erreur en parlant de L'atelier des machines de l'île, non, c'est l'atelier de la compagnie de la Machine.